Le bracelet masaï
J’ai entamé la traversée de l’hiver avec la lenteur d’une barge à contre-courant. Et maintenant Chet Baker plane sur la vallée et mes envies d’ailleurs. Alone together me brûle les veines avec ses volutes noires et blanches. Alors je regarde le bracelet masaï que l’on vient de m'offrir, mon talisman en perles de verre.
Je voudrais une saison, un pays un souvenir, un parfum, le sien, la Tanzanie aussi.
Le pays de celle qui a tenu ce bracelet aux couleurs de l’Afrique, enfilé les perles minuscules sur leur chemin de métal, le nom de celle qui a choisi ce rouge, dessiné le vert et le blanc entre les lignes noires. Je devine sous son ongle bombé, l’extrémité pulpeuse et fine de ses doigts, la rapidité de son geste. Mécanique, distrait ? A quoi pensait-elle en tressant pour moi le ciel entre deux battements de cils ?
Une femme au crane rasé vêtue d’ocre rouge, mais quel est le nom de son village ? Je l’imagine à l’est de Kilosa ou peut-être à l’ouest des savanes du Serengeti, dans les réserves Masaï.
Je porte la nuit, nos solitudes, son bracelet. Le reconnaîtra-t-elle quand je m’avancerai un jour, vêtue de blanc ?