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Sybille de Bollardière
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Yoshka

24 Octobre 2008, 19:19pm

Publié par Sybille de Bollardière

Chambre de Yoshka

 

 

 

Lettre à Yoshka,

 

Cela fait déjà quelques jours mais je le sens bien, entre tes quatre murs tu te cherches une maladie comme on cherche la couleur de son futur tableau, une maladie symphonie pour enterrer l’amour perdu, une maladie pour en finir et que je t’écrive ta fin et la mienne enlacées. De notre amitié passionnelle tu fais un tombeau.

 

Alors j’invoque des dieux fatigués qui ne comprennent pas pourquoi je viens les réveiller, moi qui ne crois plus aux miracles, j’invoque des fées au bord du périphérique pour un ami qui les braconne dans des motels de banlieue.

 

Je t’avais promis la gloire et l’amour ou l’amour et la gloire comme tu veux, je promets beaucoup, tu le sais et je tiens un peu tout de même… Alors relève toi sinon je te coucherai sur une page blanche et tu peux craindre le pire, ton silence est mort. Crois moi, il est des linceuls que craignent même les agonisants. Je t’attends ! On avait dit « écrire » il n’y a rien à espérer dans les antichambres blanches et moites où le désir s’essoufle.

 

Dehors il ya des combats, des femmes, du vin et des pages ou s’enrouler ivres de mots pour une éternité. Qu’en dis tu ?

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Le retour de Yoshka

24 Octobre 2008, 19:17pm

Publié par Sybille de Bollardière

Neuvième jour d’octobre et de folie ordinaire. Nous sommes des orangs-outangs sans poil avec une crise sur les bras dont je refuse de parler.

 

D’autant que j’ai un autre problème : mon ami Yoshka est guéri mais cela ne veut pas dire du tout qu’il aille mieux, loin de là !

 

Encore une fois j’ai agi sans discernement. C’était après la mort de mon chat. J’étais tellement bouleversée qu’il me parut inimaginable de remplacer Chopin enfin, celui à qui je donnais du « Monsieur du Chat ». Une amie désolée de me voir dans cet état me conseilla de prendre un chien ou à défaut un ami. Un ami ? lui ai-je demandé sans vraiment comprendre…

 

- Bien sûr, un ami, un garçon quoi, enfin ajouta-t’elle en me regardant… Plutôt un homme en rapport d’âge… Comme je me montrai sceptique sur l’intérêt d’un tel investissement affectif elle persista :

- Tu verras, ça te fera beaucoup de bien, c’est une vraie compagnie ! Et puis vous pourrez parler, et même écrire ensemble pourquoi pas ?

 

C’est à la suite de cela que je rencontrai Yoshka. Mais passés les premiers jours, je dus me faire à l’idée qu’il ne remplacerait pas du tout Chopin. Monsieur du Chat avait une grâce féline toute naturelle, un tact, une finesse inégalable. Alors que Yoshka est touchant c’est vrai et même intelligent, mais désordre, en retard, équivoque, archaïque, maladroit et puis fragile…

 

Voilà bien le problème… Yoshka est fragile !  Il a des peines de cœurs qui le poursuivent et cela lui mine le foie… (Ah n’allez pas faire des jeux de mots !)

En plus de cela, on vient de lui administrer un traitement de cheval que même un chat ne supporterait pas. Il est guéri oui, mais dans quel état !

 

C’est d’ailleurs ce que j’ai dit au médecin de garde en allant le récupérer :

- Et moi qui espérais qu’un ami de mon âge ça me ferait de l’usage… Maintenant c’est sûr, avec ce que vous lui avez fait, il va marcher beaucoup moins bien qu’avant ! 

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Le poème de Blanche

24 Octobre 2008, 19:16pm

Publié par Sybille de Bollardière

 

Toi qui me devances d’un pas

Et que je suis dans l’ombre

 

Que deviendras tu quand même mon désespoir t’auras laissé ?

Passager inutile d’un paysage désincarné

Où traînent une saison et l’ultime source des larmes

A quelle douleur te livreras-tu

Quand le temps me vouera au détachement ?

 

 

Faudra t-il apprendre la douceur

Et à défaire enfin ces liens d’attente

Que nous avions si longuement tissés

 

Nos passions et nos peines nous quittent

 

Bientôt nous serons libres,

Oui, libres au point d’en avoir tout oublié

Moi aussi je laisserai en chemin

Le regret des pages inachevées

 

Ce soir je te rejoins

Et n'attends plus rien qu'on ne m’ait déjà donné

 


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Route de Saumane, Rencontre

24 Octobre 2008, 19:14pm

Publié par Sybille de Bollardière

 

 

Voilà deux jours que je relis la chronique de Jérôme Garcin dans le nouvel 0bs… Elle commence par « la première fois que j’étais allé à L’Isle sur la Sorgue rendre visite, l’hiver 1984 à René Char… » Il s’ensuit une description de cette première rencontre que je vous laisse découvrir dans le dernier numéro du magazine.

Si je n’ai qu’un journal, c’est ce dernier et si je ne lis qu’un article, c’est la chronique des livres de Jérôme Garcin. Parfois c’est très peu, mais rarement aussi peu qu’aujourd’hui où je bute avec émotion sur ses premières lignes.

Moi aussi j’étais allée aux Busclats… C’était durant l’hiver 1980, je n’avais pas trente ans et venais de terminer mon premier recueil de poèmes « Alizarine ». J’avais un amoureux à Paris qui avait un ami à Avignon, les deux hommes devaient avoir envie de me plaire et se mirent en quatre pour que je puisse rencontrer le poète que je venais de découvrir lors d’une exposition qui lui avait été consacrée à la Bibliothèque Nationale...

C’est ainsi que lors d’un après midi glacé et brumeux de février ou de mars, je pris la route de l’Isle –sur-la-Sorgue. L’ami d’Avignon m’avait dessiné un plan que j’ai longtemps gardé et que ce soir là, je tentais de suivre scrupuleusement. Sur le siège du passager, j’avais posé à l’intention du poète quelques poèmes récents mais hélas, je ne possédais pas l’incontournable carte Michelin du département. L’oubli fut fatal. Je m’égarai sur une route boueuse entre deux champs de lavande et n’apercevant ni maison ni hameau dans la brume du soir, je décidai de faire demi tour. Bien m’en prit, ma voiture s’immobilisa après avoir patiné sur le talus gorgé d’eau.

J’étais debout sur le chemin, attendant la nuit et une idée pour me sortir de là, lorsque je vis arriver un homme de grande taille à la démarche pesante d’un paysan. L’homme s’approcha de moi et  s’inquiétant de ma présence à cette heure tardive sur ces chemins de campagne, me proposa de m’aider à déplacer la voiture.

 

Tout en guidant mes manœuvres, il se pencha vers moi et s’enquit de la raison qui m’amenait sur la route de Saumane. Je lui répondis que j’étais venue sur le conseil d’un ami Y*  pour voir René Char. Il se redressa et me dit :

-   Je suis René Char ! Mais pourquoi Y* ne m’a-t-il pas appelé ?

-   Il devait le faire…

La nuit était là, il me fallait rentrer, René Char avait des amis à dîner. Il me proposa de revenir le lendemain et je ne pouvais pas. Un autre rendez-vous m’attendait, un de ceux que l’on ne déplace pas, même pour René Char. Une visite à la prison des Baumettes.

Je quittai Avignon le lendemain à l’aube pour Marseille et je regagnai Paris le surlendemain. A mon retour je reçus un petit mot très touchant de René Char, puis une autre lettre quand je publiai Alizarine. C’était un éloge sensible, presque fraternel, qui effaçait la distance, les années entre nous. Il promit de m’appeler lors d’un de ses passages à Paris et le fit plusieurs fois. Mais malgré nos échanges d’appels et une ou deux lettres, je ne le revis jamais. Emportée dans la tourmente d’une vie, j’étais au Congo quand il mourut. Plus tard des amis de l’Isle sur Sorgue m’offrirent cette photo de lui où je retrouve la stature imposante de l’homme de la route de Saumane.


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