L'Orange de Mars 12 - Derrière les lignes, quelques renoncules orange...
De Malcom à Savannah
Objet: vendredi, vous
Date: lundi 24 mars 2003 19:23
Savannah,
L'âme vague, le pas éponge pour s'absorber. Aucun message dans le ciel, trop bleu, mais pas assez cuivré. Les pies sont odieuses, elles trichent. Font-elles ménage à trois, évoluent-elles en couple ou romantiques aiment-elles prendre le ciel pour amant ? Les pies sont oiseaux et appariteurs de nos envies. Quant au dépit des pies qui s'épient et jacassent, il faut en garder le mystère et rester sur terre.
Votre repentir, Savannah, que ce soit un espoir, un élément de ce qui est à venir dans cette composition de nous-mêmes. C'est de celui-là que je veux espérer. Ce repentir qui, en peinture, est la correction naturelle mais aussi une maîtrise retrouvée.
Vendredi, vous, ne fuyez pas ! Pour le goût d'encore et d'après, revenez de cette promenade avec le jaune des ajoncs et les noirs varechs pour mieux souligner toutes vos ponctuations et accompagner les trilles des merles parisiens.
Je vous embrasse
Malcom
De Savannah à Malcom
Objet: les nuits.
Date: mardi 25 mars 2003 08:50
"'Ne sais-tu pas que la nuit se penche à toutes les fenêtres, infatigable, pour trouver les siens, les reprendre, rappeler doucement, d'une seule étoile à peine murmurée, ceux qui se prétendent guéris ? Il faut qu'elle me voie tel que jadis, les mains vides, le cœur désert, à cette table même, où pour une heure j'essayais de la fuir. Il faut qu'elle me pardonne. Il faut qu'elle m'accueille enfin pour toujours, j'attends le signe, je l'attendrai jusqu'à l’aube s'il le faut" Gustave Roud....
Il n'y a gère plus que dans les montagnes que la nuit me parle de la sorte, ici, elle est comme abrégée et me livre au bitume, telle une insomniaque. Le courage quotidien s'est exilé, comme si cette guerre dont on nous bassine la cervelle me renvoyait 'à mes foyers'. J'ai des images qui me poursuivent : la voix de cette prisonnière noire du Texas, une certaine Shena, ou quelque autre nom américain qui ne ressemble à rien. Une jeune femme noire prisonnière des irakiens, des américains qui se tuent entre eux dans des jeux rituels qui n'ont plus rien de fraternels et dans le ciel, des essaims d'avions et d'hélicoptère qui bourdonnent dans un ballet mortifère... The game is over... Face à cela : Le désert, la terre et le ciel chauffés à blanc et les fils du sable rampants à jamais insoumis. Parfois je me dis qu'il y a des lois immuables qui échappent à toute stratégie, la terre appartient à ceux qui peuvent y survivre de ses fruits, les autres ne sont que de passage, illusion éphémère qu'effaceront en leur temps ces vents de sable qui précèdent la chute des civilisations.
Retranchée de mon devoir qui me commande de filer au boulot derechef, je me mords les lèvres et serre les dents en vous écrivant ce petit mot. Ce soir je dîne avec des amis je ne serai pas devant mon pc pour honorer notre relation de mots. D'ici là c'est encore une journée ouverte qui m'attend avec son lot d'heures trop lentes, vides ou au contraire précipitées et tout cela volé à cette belle journée insolente de mars où il conviendrait d'aller marcher contre quelque lisière.
Très bonne journée à vous Malcom, je vous embrasse.
Savannah
De Savannah à Malcom
Objet: orange...
Date: mardi 25 mars 2003 20:07.
Soleil orange ce soir, le disque énorme reposait sur la griffe des arbres, couronnait l'horizon comme un étrange message. Il y a parfois des jours qui ne ressemblent à aucun autre où la lumière s'offre comme un oracle à déchiffrer.
Papiers orange de vos fleurs saumonées, orange toujours le lien qui les maintenait et la carte épinglée.
Et là justement, sur mon bureau un verre de jus d'orange pour reprendre des forces avant de 'paraître'
« Derrière les lignes » pourrait être le titre de la journée. Il existe aujourd'hui un Paris qui semble dormir entre les uniformes et les camions blindés, un Paris guidé, étranglé de grilles et de silence, où je me glisse vers un curieux destin.
Les marronniers ont pris leur tenue de Printemps et l'asphalte sa teinte de poussière, le printemps n'est beau que dans la lumière du soir, dans les parcs et au matin parfois. Je vous imagine volontiers sur votre coursier dans cet air léger en quête d'images mais aussi de ces mots 'tournés' avec l'habilité du potier. Je n'ai pas ce talent, j'écris pour respirer, parfois en saccade, comme ce soir, quand l'air me manque.
Je vous joins un poème, le plus épique, le plus orange... encore que vous pourriez le juger autrement. Très bonne soirée à vous, je vous embrasse. Savannah.
De Malcom à Savannah
Objet: Simultanée....
Date: mardi 25 mars 2003 20:13
L'apaisement, Savannah, soyez toute à la joie d'être de l'humaine condition. Accepter sans renoncer. A la lisière, souvent, un merle couvre dans l'ombre quelque projet remuant. Bientôt, la sente s'égaie de son cri. J'aime trop les merles, vous l'aviez compris, pour ne pas aimer en partager les joyeux bruits.
La guerre, mais quelle guerre ? Souffrons celle-ci dans son horrible confort. Bientôt nous reprendrons la lente procession des compromis. Prendre de la hauteur, écouter et partager. Nous en reparlerons.
Les fleurs ? L'habitude ? Permettez-m’en Savannah un certain usage. Les fleurs orange, renoncules, sont de précieuses amies pour esquisser un sourire, en prendre l'habitude non par nécessité mais avec surprise. Se surprendre à sourire...
Cadeau
Ruban, gros-grain satin à vif et douceur serpentine
Papier, s'il vous plaît
Vous êtes fou
Écoutez
Entre le feu et la cendre
Quelque escarbille s'est échappée
Ne l'attrapez pas
Elle s'est absentée
Hors de vous
Absente et rattrapée
La nuit a mille yeux. À mille lieu en un pays sans songe, en un passé sans nomade, un trait fut tiré. La nuit à mille lieux, mille et une lieu pour une nuit. Mais ? Vous tournez en rond. Et déjà le soleil poursuit sa course et la lune change de quartier et le meunier de l'enfant qui dort n'a plus de grain à moudre. La farine ? Roulée !
Je vous embrasse
Malcom
à suivre