Voyage au Maroc
Un voyage au Maroc ou plutôt un séjour entre deux villes, Essaouira et Marrakech, qui n’ont pas grand-chose de commun hormis ce ciel sans nuage qui m’a accompagnée de l’une à l’autre.
Il faut aller à Essaouira pour la couleur, pour ce bleu inouï et cette lumière abrasive qui percute les façades et suspend le temps. Sous un ciel lavé de vent, brossé de sable, j’ai lu Edith Wharton1 et son voyage des années 20 dans le sillage de Lyautey (Elle n'évoque pas Essaouira mais Rabat, Fès, Meknès et Marrakech ainsi que l'histoire et les coutumes du Maroc à cette époque). J’habitais l’Hôtel des Remparts, une demeure construite à la demande du sultan pour son négociant le plus important : Maymoune Ben Izhak. C’est là que séjournèrent Orson Wells et Jimi Hendrix. Chaque matin sur la terrasse qui domine les remparts et l’océan, j’ai délaissé les carnets, stylos et autres pour boire la lumière des îles purpuraires, de Mogador où une ancienne prison et quelques ruines romaines servent d’abri aux innombrables mouettes. Plus tard j’ai fait comme les touristes qui viennent pour la journée se perdre dans les ruelles de la Medina. J’ai cherché du passé, acheté des couleurs, Bleu et Pourpre de Mogador et regardé les chalutiers rentrer sous leurs nuages d’oiseaux dans la lumière du soir.
Je serais bien restée à Essaouira…
Après quelques collines couvertes d’arganiers, une plaine semi-désertique avec ses villages de cases aveugles dont ne dépassent que les antennes satellites, une large route rectiligne nous emmène jusqu’à la ville rouge.
Aujourd’hui encore, en feuilletant le guide (très réussi et très utile) du Lonely planet2, je cherche une raison d’aimer Marrakech. J’énumère ses beautés : l’apogée de l’art arabo-andalou dans la Medersa Ben Youssef, le palais de la Bahia qui avait déjà séduit Edith Wharton, et puis le riad, qui comme tous les riads est magnifique, peut-être trop, pour ne pas dire parfait mais ce n’est pas tant la perfection que l’on cherche en voyage que l’âme d’une ville et, en dépit de son désordre, la médina en parait dépourvue. Tout se monnaie à Marrakech, même un sourire… Ne pas pouvoir répondre à un bonjour ni demander son chemin… Les touristes se rassurent dans la splendeur laquée des jardins Majorelle, à la terrasse des cafés de Guéliz ou dans les piscines des nouveaux quartiers. Marrakech ville étrange qui vous impose de marcher en regardant le ciel et jamais un visage, une ville où l’on fuit en lunettes noires vers les puits de lumière des riads ou des hôtels.
J’aimerais revenir à Essaouira et je repasserai probablement par Marrakech l’incontournable. La ville rouge est devenue ce que fut le sud tunisien dans les années 70-80, notre plus proche échappée vers le soleil et le grand sud.
1 – Voyage au Maroc, Edith Wharton Collection l’Etrangère, Gallimard
2 – Marrakech, Itinéraires (plus L’Atlas et Essaouira) Lonely planet Casterman 15€