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Sybille de Bollardière

Ecrire et quoi d'autre ?

6 Janvier 2015, 15:30pm

Publié par Sybille de Bollardiere

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9 Décembre 2014

La lune côté jardin, énorme ce matin. C’était hier, une journée de pluie glaciale, de pavés mouillés et glissants, je suis arrivée avec mes idées du jour, une proposition d’écriture sur la main pour janvier, une autre sur la honte à écrire tout de suite, sans réfléchir, avec ce qui vous vient. Le dernier atelier de l’année s’est installé dans l’ambiance feutrée d’un salon qui prend des airs de yourte en hiver. Un moment intime et bavard où tout ce que l’on définit comme inutile et à éviter dans un lieu d’écriture collective a pourtant cours. Sur la table de travail où la flamme des bougies se reflète sur les sets dorés  à côté des cahiers et des stylos, une carafe de verre bleu remplie de cabernet sauvignon, une coupe de porcelaine avec des éclats de marrons glacés et quelques tranches de cake. « Elles », le verre à la main, distraites et parfumées quand elles ne sont pas concentrées  sur leur texte, évoquent l’écriture, le blog, les séjours de mer et de travail, un futur recueil. Plus tard je les regarde écrire la honte en listant les miennes.

Le plafond est gris, mouluré, de lourdes tentures dans des tons de bleu fané recouvrent les murs, un canapé, des fauteuils.  Des paravents en moucharabieh masquent un convecteur électrique, une fenêtre. Partout des bougies, des coupes de coquillages,  une collection de scarabées encadrée, un éventail décoré de motifs orientaux. La lumière est dorée, rousse comme ces reflets dans les yeux du chat qui miaule face à mon indifférence.

4 Janvier 2015

La cote d’émeraude en hiver, ses couleurs d’opale, les tons bistre de la plage où je viens d’arriver. Sur le chemin j’ai croisé ceux qui avaient rendez-vous avec le seigneur à la messe de 11h et d’autres avec la queue d’une boulangerie pour la galette des rois à la frangipane. Maintenant je suis face à la mer, celle où je me regarde écrire après avoir déserté l’autre, la mère qui garde la chambre dans une atmosphère tropicale. Ici, face au blanc laiteux du paysage, dans cet effacement des iles absorbées par la brume,  je dépose ma mémoire amnésique. Non je ne me souviens pas, oui j’oublie et c’est ma respiration. Si ce n’était pas pour moi, je n’écrirai plus mais comment se priver de ces vies alternatives que m’offrent les romans ? Je suis celle-là que je décris à Trieste ou ailleurs bien plus que celle qui s’efforce de durer dans l’espace exigu des souvenirs maternels. Je l’ai longtemps regardé vivre et elle me regarde écrire maintenant. Je suis la seule qui lui reste et c’est ma damnation.  

Dès demain je m'y remets. Ecrire et quoi d'autre ? Où que je sois, toujours libre d'être ailleurs.