A défaut d'écriture...
C’est une journée d’écriture et de doute, un matin gris sous un ciel immobile où l’on tente d’aligner des mots, de remonter le fil de ce qui pourrait être l’histoire, le récit, le commencement et pour cela il faut le temps, le rythme et surtout ne pas perdre de vue ces images avec lesquelles on vit depuis de longs mois déjà. Oui le roman comme un train poussif, traverse les paysages, les contourne parfois et se perd en route dans les aspérités de la langue, le téléphone, les miaulements du chat et la tentation du net.
Trop près du début pour ne pas redouter de tout perdre à chaque virage, à chaque hésitation, je m’accroche et je peine sur une phrase lourde que je frappe sur l’enclume. Tout est pesant alors que j’aurais aimé m’envoler dans un récit tourbillonnant, sourcier plus que forgeron. Dix heures sonnent déjà et je suis toujours là, à la porte de ce livre. C’est pour cette raison que je finis par aller marcher, à défaut d’écriture je quitte les gémissements de ma forge pour le vert des paysages.
Ici c’est le règne des pluies, bassin versant nord, l’eau inonde l’ouest, la côte et me sature de larmes jusqu’à ces portes vertes qui cachent des jardins repris par la forêt, des villages oubliés, des murs où s’étale l’insolente écriture du lichen*…
Mousse et lichen sont des végétaux épiphytes (qui poussent sur d'autres plantes).Les lichens sont le fruit d'une symbiose entre un champignon et une algue. Fort résistants, ils ont la capacité de résister à de très fortes dessiccations et peuvent également survivre à des variations de température importantes (de -70 à +70 °C !).