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Sybille de Bollardière

poesie

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Laisser verdure de François Montmaneix

31 Décembre 2012, 11:30am

Publié par Sybille de Bollardiere

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Sans retour

  

I

 

Un feu là-haut sur la colline

projette d'ombre un chêne gigantesque

ses branches sont les aiguilles des heures

d’où calmement descend la nuit

sur l’ancienne ferme à l’abandon

 

Du puits montent des ronces des orties

la porte n’est plus qu’un rictus

près des restes d’un banc de pierre

auquel manquent ses murmures

je me tais de toutes mes forces

 

Depuis combien d’années la solitude

est-elle ici chez elle ?

 

 

II

 

J’essaie de me parler d’avant

d’un temps de bœufs rentrant couverts de brume

de cris d’enfants d’abois

dans les pattes des bêtes besogneuses

de la chaleur du vin du sucre des pommes

 

Je suis seul et la terre est obscure

je contemple le ciel plein d’étoiles

une feuille morte s’en détache

je relève le col de ma veste

en m’éloignant étrangement

 

Est-ce du même pas

que jadis le fermier

sans ses clés sans se retourner ?


François Montmaneix, Laisser Verdure,

 Le Castor astral, 2012

Préface d’Yves Bonnefoy 

« Sous l'éclairage de ce que Maurice Denis disait d'un tableau, on pourra se rappeler qu'un poème, avant d'être un instant donné, l'éclair d'une rencontre, une rêverie en marche, un monde habité, est essentiellement un espace plan recouvert de mots en un certain ordre assemblés. Ce sont les désordres de cet ordre-là que l'auteur est allé interroger. De leurs innombrables et incessantes réponses - l'une prenant aussitôt la place de l'autre -, il a tenté de réunir les voies et de rassembler les voix : celles-là en une continuelle croisée des chemins à venir, celles-ci en un choral où le contrepoint tient lieu de charpente à un édifice dont les ouvertures sont issues du mouvement profond qui voudrait les élever vers ce qui leur est un ciel étoilé : le visage du lecteur, ce frère en inquiétude et en solitude, lui aussi à la recherche de son semblable. Puisse-t-il le rencontrer ici, dans ces quelques mots en un certain ordre assemblés, cet être au monde à qui confier le moment où le présent prend son essor et où la vie est alors partageable, tel le lied entre le chanteur et le pianiste qui parcourent ensemble l'espace d'une forme sans laquelle ils ne viendraient pas au monde ainsi qu'il vient à eux. » François Montmaneix « Laisser verdure ? En tout ce qui est reconnaître bruissement léger, frémissement, transparence comme d'un feuillage dans la lumière, et faire de ce constat - non, de cette instauration - ce qu'on peut confier à des mots : voilà bien ce que ce poète avait en esprit quand il a entrepris et mené à bien son livre. Et il n'est pas d'ambition plus haute ; ni de plus utile réponse au besoin de l'heure présente. »

Yves Bonnefoy


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L'écrivain

26 Décembre 2012, 17:12pm

Publié par Sybille de Bollardiere

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Magritte

 

La Cérémonie


C’est l’heure des adieux et des éloges

Et dans l’arène désertée

Où les voix amies se sont tues

On écarte l’auteur pour dresser sa statue

 

Je sais que je t’aurais aimé, admiré aussi,

Autant qu’on peut l’être

Même si, et je ne peux l’ignorer

Tu aurais probablement été indifférent

Dur, sarcastique et cruel comme ce regard obscur

Qu’éclaire le duel apaisé de tes mains nouées

 

Toi que je devine,

Assis ou dressé dans la lumière d’une gloire encombrante

Toi que j’aurais aimé

A n’en pas douter, plus que de raison

Et cela, sans craindre l’âge

L’ultime commémoration des corps

Et cette pause arbitraire que les héros

Se donnent pour image à la veille d’en finir.

Toi qui me cherches encore 

Sans pouvoir me nommer

Je t’aurais aimé sans mesure

Comme cet espace où tu t’es réfugié

Au delà de tout

Pour être au cœur des mots

Et d’un essentiel qui n’appartient qu’à toi.

 

Poème, extrait de "Territoires" 2012

 



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L'aveu

9 Décembre 2012, 21:57pm

Publié par Sybille de Bollardiere

 

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Je l’aime à distance et dans le secret

Autant pour ce qu’il est

Que pour ce qu’il aurait voulu être

Aujourd’hui, plus qu’un pays

C’est une saison qui m’est devenue étrangère

Loin de lui

Je n’aime plus l’hiver


Poème extrait de "Territoires"

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Le sable des passions

24 Novembre 2012, 11:49am

Publié par Sybille de Bollardiere

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Photo Web DR


La nuit est tombée et encore une fois je ne m’en lasse pas

J’aime ses silences et sa lenteur profonde,

Longue nuit de novembre qui ne pâlit jamais

Ou si tard, juste dans le halo des lampes

Dans ce creux de mémoire où se dessine le profil des absents


J’écris contre le temps noir qui cogne à la fenêtre

La crainte et l’espoir et tous ces intervalles

Qui prolongent l’attente

J’écris pour que reviennent

Des soirs d’été, les pages lues sous les étoiles

La fraicheur du vin, la sueur sur les visages

Et nos mains tamisant le sable des passions

 

Pour lier chaque jour à son nom, ne rien perdre des nuits

J’allume un feu et tisonne braises et avenir


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