"Les gens de la côte" de Monzer Masri
Au café le matin, au café le soir
Le matin
entre dix et une heure
tu seras,
pour qui veut te voir,
à ta place habituelle
au café du trottoir est
suivant du regard
les morts
qui passent
Et le soir
entre cinq et neuf heures
tu seras,
pour qui veut te voir,
air détaché,
écrasé
à ta place habituelle
au café du trottoir ouest
mire du regard
des vivants
qui passent.
Navire égaré, rivage abandonné
Étais-tu navire égaré
et moi rivage abandonné ?
Étais-je navire égaré
et toi rivage abandonné ?
Ou étions-nous tous deux
navires égarés
qui se croisèrent au large
d’une mer sans rivage ?
Aujourd’hui,
vagues giflant mon visage
et le giflant encore,
jamais plus
– je le sais –
rencontre n’adviendra
car nous sommes seulement
nous sommes depuis toujours
deux rivages
abandonnés.
Monzer Masri
poète et peintre syrien né en 1949 à Lattaquié
« Les gens de la côte » est paru en français aux éditions Alidadès en 2005.