Le pain de mai
En finir d’Avril
Ce matin, passer de l’ordalie amoureuse de Quignard au jugement des pluies. Vrombissement des tondeuses sous l’averse et pourtant je reviens sans cesse à cette attente de bleu et de vent suspendue à l’orage, au bonheur inouï d’être là dans le souvenir étendu, de demeurer celle qui ne cesse d’épeler tes noms de solitude.
Commencer Mai en Baie du Mont Saint Michel
Des continents de nuages défilent au-dessus de moi, des pays inconnus, immenses qui frôlent de leurs ombres ces champs maritimes où l’on cultive l’huitre et le silence en guettant les marées.
Le pain de Mai :
Quand les pluies traversaient la vallée, j’ai fait mon pain. De l’épeautre, du blé complet et du levain qui reposent avec les mots du poème, près du poêle. Des mots, il faudra que j’en trouve de nouveaux pour décrire cette crainte où je suis rentrée hier. Une crainte froide et sèche comme la nuit.
Le secret est dans ma chambre. Il attend et me guette en silence, il n’est ni menaçant ni craintif, seulement patient. Il attend son heure. Cela fait si longtemps qu’il me regarde m’agiter, parler, écrire, dessiner, fuir. C’est lui qui m’a conduite ici dans l’étroite vallée, cet écrin de silence où l’on fait son pain en pétrissant les nuages et d’anciennes larmes.
Et maintenant le soleil signe un coquillage sur la table où le pain refroidit. Je voyage désormais entre les lignes d'un livre à ne jamais finir.