Sybille de Bollardière
Auteure. Romans, récits, poèmes. Atelier d'écriture, photos.
Entre les pluies
Jeudi 20 juin 17 heures
Entre les pluies reprendre le livre, retrouver son sujet et la force d’aller plus loin dans ce maquis de brouillons, de notes et de tout ce que l’on aimerait dire. Cultiver le secret dans le doute parfois jusqu’à l’abstinence. Les pages qu’on ne peut écrire sont souvent les plus belles, elles sont là, entre les lignes, invisibles mais mélodieuses, ce sont elles qui me donnent le rythme.
Vendredi 21 juin 7 heures
« La chambre de bonne » en écrivant ces mots ce n’est pas le lieu où vient de s’installer I. que je découvre mais tout un pan de vie où la fiction croyait s’abriter en toute impunité. Derrière la toile de jute un peu fanée que l’auteur a posé sur les murs pour pouvoir décrire la vie de son héroïne dans son « nouveau chez soi », dix années hors sujet surgissent ce matin. Souvenirs sous les toits quand j’épiais la vie d’à côté pour en connaître les secrets dérisoires et cette misère silencieuse qui se lavait à l’eau froide du couloir. Des années anciennes qui n’ont rien à voir avec mon récit, et des pas qui s'annoncent entre les pluies... Sonnent la récréation du week-end.
Séance de purification à l'encre
Mémoires
Dimanche en deuil de semaine
Séance de purification à l'encre
Je n'étudie pas le bonheur
Mais sa trace - ce qu’il en reste
Ce qui le cerne et l'annonce
Dans la macération des heures
Dimanche à l'heure des laudes
Quand la lucidité insomniaque
Dicte les souvenirs d'une mémoire labile
Extrait de Territoires
Poésie
"l'autre" en écriture
Pour quelques heures arrêter de croire que l’on est d’une quelconque utilité pour son livre en dehors du geste automatique d’écrire. Impression que les romans, naissent, prennent leur envol indépendamment de notre volonté. Comme les arbres sont liés à la terre qui les porte, ce que nous écrivons se nourrit à l’humus de notre propre vie, c’est cette dernière qui compte avant tout. Il faut la voir en grand, lui offrir un espace généreux, aimer et parfois s’oublier jusqu’à se perdre de vue.
L’autre dans l’écriture, celui dont on aimerait parler mais qu’on ménage ou travestit et ce n’est plus lui. L’autre que l’on traque entre les lignes à demi-mot, cet amour à qui l’on règle son compte en croyant se libérer, la haine, cette peur qu’on apprivoise, qu’on détourne parce que le temps ne nous rendra jamais rien d’autre que notre image.
Nos mots ne font que finir ce que la vie avait commencé. Le soin qu’on prend de l’autre dans l’écriture, c’est encore elle qui nous poursuit et ce ne sont jamais que nos sentiments que nous signons.